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CONSÉQUENCES DE LA CULTURE INTENSIVE DU COTON SUR LA DÉSERTIFICATION DANS L’ALIBORI: Nécessité d’adopter des pratiques agroécologiques

La culture  du coton, pilier de l’économie béninoise, génère des revenus essentiels pour de nombreuses familles rurales. Cependant, cette réussite se paie au prix fort, avec des conséquences écologiques et sociales alarmantes particulièrement dans le département de l’Alibori, bassin cotonnier. La déforestation, la dégradation des sols et la désertification menacent non seulement l’environnement, mais aussi la sécurité alimentaire et la stabilité socioéconomique. Face à cette situation, plusieurs solutions durables sont proposées et mises en place pour préserver cette richesse nationale tout en protégeant les ressources naturelles essentielles.

Ulrich DADO TOSSOU

Le Bénin, avec sa production de plus de 765 000 tonnes de coton en 2020 et 587 000 tonnes en 2023, se positionne comme le plus grand producteur de coton d’Afrique. Ce succès économique a toutefois un revers environnemental préoccupant, particulièrement dans la région de l’Alibori. Cette agriculture serait un moteur de la désertification notamment dans certaines communes de l’Alibori. La recherche incessante de nouvelles terres agricoles pousserait les producteurs à défricher des forêts, menant à une déforestation accélérée. La désertification, définie comme la dégradation des terres dans les zones arides et semi-arides, est exacerbée par la surexploitation des sols, l’absence de jachère, et l’épuisement des nappes phréatiques.

Les conséquences de cette désertification sont alarmantes. «J’ai constaté un changement au niveau de la fertilité des sols depuis que je cultive le coton. Chaque année les sols deviennent moins fertiles surtout lorsqu’on a commencé par utiliser la charrue a disque pour le labour.», a fait constater Djoude Alou, trésorier général de l’Ucom Kandi et producteur de coton. De plus « Il n’y a plus assez d’arbres pour contenir les vents violents ce qui fait tomber les cultures mises en place. », a-t-il enchaîné. La désertification entraîne également des irrégularités des pluies «Créant ainsi des poches de sécheresse, qui impactent négativement la production cotonnière dans la région de l’Alibori. », selon Djoude Alou. A cela s’ajoute la perte de la biodiversité rendant les sols de moins en moins résilients. L’insécurité alimentaire augmentant. A cet effet le Docteur Armel Kouglenou, agro-sociologue, déclare que  les espèces locales, cruciales pour la subsistance des habitants, disparaissent, aggravant la pauvreté et déstabilisant l’équilibre socioéconomique.

Par ailleurs, la culture intensive du coton, bien qu’elle soit une source majeure de revenus pour plus de 50% de la population béninoise et qu’elle génère plus de 40% des emplois en milieu rural, présente des défis écologiques de taille. Dr Kouglenou pense que l’utilisation massive d’engrais chimiques pour maintenir des rendements élevés contribue à la pollution des sols et des nappes phréatiques, qui sont essentielles pour l’approvisionnement en eau potable. Les substances chimiques non absorbées par les plantes sont souvent lessivées par les pluies, polluant ainsi les cours d’eau et appauvrissant les sols.

Pour contrer ces effets néfastes, des pratiques agro-écologiques durables doivent être adoptées. La technique du Zaï, qui consiste à semer dans des trous enrichis de matières organiques, peut aider à restaurer les sols dégradés et à optimiser l’utilisation de l’eau de pluie. Le reboisement et le boisement sont également essentiels pour prévenir l’érosion des sols, améliorer leur fertilité et restaurer les écosystèmes. Il est aussi crucial que les producteurs de coton utilisent rationnellement les engrais chimiques, qu’ils pratiquent la jachère avec les plantes améliorantes et qu’ils intègrent la fertilisation organique et minérale dans leurs pratiques. La combinaison de la gestion des terres et des eaux est nécessaire pour protéger les sols contre l’érosion et la salinisation.

De même le gouvernement béninois n’est pas resté indifférent face à cette situation. En 2017 le gouvernement a mis en  en place le projet Transition agroécologiques dans les zones cotonnières  (Tazco). Ainsi, ce dernier a pour objectif d’améliorer la fertilité des sols avec comme finalité de sécuriser le niveau de vie des agriculteurs du coton sur le long terme. Bien que la production cotonnière soit une pierre angulaire de l’économie béninoise, il est impératif de trouver un équilibre entre développement économique et préservation de l’environnement. La mise en œuvre de pratiques agroécologiques durables peut aider à assurer un avenir plus résilient pour la région de l’Alibori et ses habitants.

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