La Banque Agricole du Sénégal (Lba) vient de signer un accord de prêt de 30 millions d’euros avec la Banque européenne d’investissement (Bei) le vendredi 6 septembre 2024. Ce partenariat, soutenu par l’Union européenne, vise à renforcer les chaînes de valeur agricoles au Sénégal, tout en promouvant l’autonomisation des femmes et la durabilité climatique. Plus de 3 000 agriculteurs sénégalais devraient bénéficier de ce soutien financier, qui permettra de moderniser les équipements agricoles et d’accroître la résilience du secteur face aux changements climatiques.
Ulrich DADO TOSSOU
Face à l’accès limité du financement agricole dans la majorité des pays d’Afrique Subsaharienne, comme le Sénégal, un nouvel accord de prêt de 30 millions d’euros signé entre la Banque agricole du Sénégal (Lba) et la Banque européenne d’investissement (Bei) pourrait redéfinir l’avenir de milliers de producteurs et entrepreneures rurales. Selon l’information relayée dans le rapport Ecofin du du 9 septembre 2024, cet accord signé le 6 septembre 2024, vise à renforcer les chaînes de valeur agricoles dans les filières céréales, horticulture, arachide et anacarde, tout en offrant des opportunités cruciales pour l’entrepreneuriat féminin.
Bien que l’agriculture représente environ 15 % du Pib sénégalais et emploie plus de 20 % de la population active, l’accès au crédit demeure un obstacle majeur à la modernisation du secteur. En 2021, seuls 6,2 % des ménages agricoles ont pu accéder à des prêts, dont plus de la moitié auprès d’institutions formelles, selon les données de la Direction de l’analyse, de la prévision et des statistiques agricoles (Dapsa).
Le prêt de 30 millions d’euros, dont 70 % (soit 23,2 millions $) sont spécifiquement alloués à l’achat d’équipements agricoles, arrive à point nommé. Irrigation, mécanisation et infrastructures de stockage sont des investissements essentiels pour améliorer la productivité et atténuer les effets des conditions climatiques de plus en plus imprévisibles. En facilitant l’accès à ces équipements, ce financement pourrait considérablement réduire la vulnérabilité des exploitants et augmenter leurs rendements.
Outre le soutien général aux agriculteurs, ce prêt se distingue par sa volonté de promouvoir l’entrepreneuriat agricole des femmes. L’inclusion des femmes dans le développement agricole est indispensable dans un pays où elles jouent un rôle central dans la production, mais restent sous-représentées en matière d’accès aux ressources financières et aux technologies modernes. Une part importante des fonds sera donc dédiée à soutenir ces agricultrices, contribuant ainsi à une autonomisation qui pourrait avoir des répercussions positives sur l’économie rurale dans son ensemble.
Un autre aspect prometteur de cet accord réside dans l’adaptation des mécanismes de prêt aux réalités du secteur agricole. Contrairement aux crédits à court terme souvent inadaptés aux cycles de production, la Lba entend proposer des financements de plus longue durée, y compris des prêts saisonniers pluriannuels. Cette flexibilité permettra aux agriculteurs de mieux gérer la variabilité de leurs revenus, tout en leur offrant des ressources pour des investissements durables dans la mécanisation et l’irrigation. Cette approche innovante répond directement à la demande croissante de solutions de financement adaptées aux particularités de l’agriculture, un secteur où les revenus sont souvent irréguliers et fortement dépendants des conditions météorologiques.
Bien que cet accord soit une avancée majeure, il ne suffit pas à résoudre l’ensemble des défis auxquels fait face l’agriculture sénégalaise. Avec un taux d’accès au crédit aussi faible, de nombreux agriculteurs, en particulier ceux possédant de petites exploitations, continuent d’être exclus des circuits financiers. L’absence de garanties solides, les coûts élevés des services bancaires et l’instabilité des revenus demeurent des obstacles majeurs à l’inclusion financière.
Le prêt de la Bei, aussi important soit-il, devra donc être accompagné d’autres réformes structurelles pour élargir l’accès au crédit et toucher les exploitations les plus modestes. Des initiatives complémentaires, telles que des programmes de formation financière et des efforts pour améliorer la connectivité des zones rurales aux institutions bancaires, seront essentielles pour renforcer l’impact de ce financement.
L’accord de prêt de 30 millions d’euros entre la Banque agricole du Sénégal et la Banque européenne d’investissement, comme rapporté par l’agence Ecofin, marque une étape cruciale dans la modernisation du secteur agricole sénégalais. En facilitant l’accès aux équipements agricoles et en soutenant l’entrepreneuriat féminin, cet investissement pourrait transformer durablement les chaînes de valeur agricoles et améliorer la résilience des exploitants face aux aléas climatiques.
Cependant, pour que cette transformation soit véritablement inclusive et durable, il faudra aller au-delà de ce financement en mettant en place des réformes plus larges en matière d’inclusion financière et d’accompagnement des petites exploitations. Le succès de cette initiative dépendra donc de la capacité à démultiplier les efforts pour assurer que le financement agricole soit accessible à tous, dans un secteur qui reste le moteur de l’économie sénégalaise.