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CHANGEMENT CLIMATIQUE EN AFRIQUE : Une menace silencieuse sur les greniers du Ghana

Face à une sécheresse sans précédent qui a dévasté 62% de ses terres agricoles, le Ghana prend des mesures d’urgence. La suspension des exportations de céréales et la mobilisation du gouvernement témoignent de la gravité d’une crise qui menace la sécurité alimentaire du pays et révèle la fragilité des systèmes agricoles face au changement climatique.

Ulrich DADO TOSSOU

La terre craque, les greniers se vident. Le ciel implacable du Ghana ne laisse plus aucun répit aux agriculteurs. Alors que la sécheresse s’étend comme un linceul sur les terres autrefois fertiles, le pays est désormais confronté à une crise agricole sans précédent qui menace la sécurité alimentaire de millions de ses habitants.

Les chiffres sont sans appel : 62% des régions agricoles du pays ont été frappées par un épisode de sécheresse d’une intensité rarissime. Les cultures, jadis promesses de vie et de subsistance, se dessèchent aujourd’hui sous un soleil impitoyable, transformant les champs verdoyants en territoires arides et stériles. Le maïs, pilier alimentaire des familles ghanéennes, paie un lourd tribut. Les rendements ont chuté de manière dramatique, obligeant le gouvernement à prendre des mesures drastiques : la suspension temporaire des exportations de céréales.

Cette situation compromet près de 1,8 million d’hectares de terres agricoles, dont la moitié est déjà fortement impactée. Les cultures les plus vulnérables sont le maïs, le riz, le soja, mais également des denrées de base comme le mil et l’igname. Le nord du pays, particulièrement frappé par cette sécheresse, fait face à un assèchement des sols qui menace les rendements agricoles. « Nous devons protéger nos populations », déclare Kwame Mensah, ministre de l’agriculture. « Chaque grain de maïs, chaque sac de riz est désormais vital. » Cette décision unilatérale de bloquer les exportations de maïs, de riz et de soja illustre la gravité de la situation.

Les marchés locaux, déjà sous tension, ont vu les prix flamber. Pour les familles les plus vulnérables, chaque repas devient un défi, chaque achat un calcul précaire entre nécessité et capacité financière.

Face à ce défi, le gouvernement ne reste pas inactif. Des programmes de soutien sont rapidement mis en place : distribution de semences résistantes, aides financières aux agriculteurs, négociations pour des importations d’urgence.Mais les experts sont formels : cette crise est le symptôme d’un mal plus profond. Le changement climatique n’est plus une menace hypothétique, c’est une réalité qui frappe à la porte de l’Afrique.

« Nous devons réinventer nos pratiques agricoles », explique Adwoa Sarfo, agronome spécialiste du climat. « Diversifier les cultures, développer des systèmes d’irrigation innovants, favoriser des semences adaptées : c’est notre seule voie de survie. » La coopération régionale apparaît également comme un rempart contre la catastrophe. Les pays d’Afrique de l’Ouest sont invités à renforcer leur solidarité, à mutualiser leurs ressources et leurs connaissances.

Cette situation climatique défavorable survient alors que le Ghana, deuxième producteur mondial de cacao après la Côte d’Ivoire, doit déjà composer avec des défis structurels dans son secteur agricole. Pour pallier la crise, les autorités comptent mobiliser les réserves céréalières de la Cedeao (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest) et augmenter les importations grâce à des partenariats avec le secteur privé. Le ministre des Finances, Mohammed Amin Adam, a également annoncé sur le réseau Twitter un plan ambitieux visant à collecter 500 millions de dollars pour soutenir des initiatives de sécurité alimentaire, notamment des subventions et des aides directes aux agriculteurs les plus vulnérables.

La crise que traverse le Ghana aujourd’hui n’est pas qu’une crise agricole. C’est un avertissement. Un message envoyé à la face du monde sur l’urgence climatique et la nécessité de repenser nos modèles de développement.
Le Ghana lutte. Et dans cette lutte, se dessinent les contours d’une résilience qui pourrait bien devenir un modèle pour tout un continent.

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