Une équipe internationale de chercheurs, comprenant des experts de Tanzanie, de Sierra Leone, de Guinée, d’Éthiopie, du Sénégal, du Royaume-Uni, des États-Unis, du Brésil, de Bolivie, de Colombie, de Suède, d’Italie et de France, a récemment réalisé une étude sur les bienfaits de la diversité végétale pour la protection des cultures agricoles. Cette étude, publiée en septembre 2024 dans la revue « Nature Sustainability », se penche sur les défis liés à la conservation in situ de l’agrobiodiversité et sur les stratégies de financement nécessaires pour soutenir ces initiatives à long terme.
Mouleykatou SOULEYMANE
Le botaniste et expert en écologie des communautés végétales à l’Université Faya Julien Simbiano, souligne l’importance des espèces sauvages pour maintenir l’équilibre entre les besoins alimentaires humains et la préservation des écosystèmes. « Cette approche est essentielle pour une agriculture durable, surtout face aux effets néfastes de l’activité humaine qui modifient les écosystèmes naturels », déclare Simbiano, co-auteur de l’étude.
En Afrique centrale et de l’Ouest, les efforts de conservation de la biodiversité visant à améliorer la productivité agricole ont parfois donné des résultats décevants, selon l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (Fao). Les chercheurs recommandent donc des stratégies spécifiques, y compris la préservation des espèces végétales menacées par la pression humaine et climatique, tant in situ qu’ex situ.
Au Rwanda, la conservation de la faune et de la flore sauvages est encouragée pour promouvoir des pratiques agricoles durables, améliorer la productivité et garantir la sécurité alimentaire. L’impact des pratiques agricoles sur le changement climatique, particulièrement en Afrique centrale et de l’Ouest, est bien documenté, et il est essentiel d’adapter les méthodes de production traditionnelles pour limiter leurs effets environnementaux.
L’importance des pratiques traditionnelles
L’étude met également en lumière la pression exercée par l’activité humaine et le changement climatique sur les terres et ressources naturelles en Afrique de l’Ouest et centrale, menaçant la viabilité économique et écologique de l’agriculture. Bien que certaines techniques aient permis d’améliorer les rendements, les chercheurs estiment que l’agro-biodiversité doit être mieux intégrée dans les politiques nationales et sous-régionales de gestion des terres.
« Une reconnaissance appropriée des connaissances et des pratiques autochtones et traditionnelles est essentielle pour diversifier les pratiques agricoles et garantir la durabilité à long terme », affirme Dr James Borrell, chercheur aux Jardins botaniques royaux de Kew (Royaume-Uni) et co-auteur de l’étude. Bien que le climat de la région favorise une agriculture diversifiée, les irrégularités climatiques fragilisent le secteur et affectent la stabilité des rendements agricoles.
Les chercheurs estiment que la diversification agricole est essentielle pour la transition agroécologique, car elle permet d’améliorer la sécurité alimentaire, de renforcer la nutrition et de préserver les ressources naturelles tout en contribuant à l’atténuation du changement climatique.
Intégration de la faune et de la flore sauvages dans l’agriculture
Dr Abdou Gado Fanna, enseignante-chercheuse à la Faculté d’Agronomie de l’Université Abdou Moumouni de Niamey (Niger), insiste sur le fait que la diversité des pratiques agricoles est l’une des causes principales de la perte de biodiversité en Afrique, notamment au Sahel. « Il est crucial de protéger et de valoriser la diversité écologique du Niger, ainsi que d’intégrer la faune sauvage dans une agriculture productive pour restaurer les écosystèmes », déclare-t-elle.
Le secteur agricole génère actuellement des revenus bien plus importants que celui de la conservation, avec un chiffre d’affaires dépassant 817 milliards de dollars par an entre 2019 et 2021, provenant de 54 pays en développement. Sophie Jago, chercheuse aux Jardins botaniques royaux de Kew et auteure principale de l’étude, propose d’allouer une partie de ces fonds à des programmes de conservation de l’agro-biodiversité. Cela permettrait de soutenir les pays riches en biodiversité, comme ceux du bassin du Congo, dans leurs efforts de réensauvagement et de répondre aux objectifs internationaux de conservation.
Source : vivafrik.com